Upload Dans Le Cloud
Performance poético-numérique, 2025
Projection, lit, tissu, kinect


J’ai envie de me upload dans le cloud.
Je ne veux pas spécialement me séparer de ce corps mais,
J’ose imaginer que dans le cloud,
Mon corps n’est pas un corps ;
Il est tout ce qu’il pourrait être.
Des particules flottantes formant des masses
d’informations,
Des îlots de mosaïques qui grésillent,
Un espacement entre deux fenêtres web,
Un réseau extensible qui chatouille les fichiers perdus,
Des bots cherchant à sociabiliser,
Peut-être même, une donnée dématérialisée stagnante.
Un brouillard de pop up,
Une image virale qui s’étend à travers les écrans,
Drag and drop les veines qui me contiennent ;
Je pourrai matérialiser l’image d’un corps,
Un qui dépasserait l’entendement,
Ou un corps de turbo bimbo a moustache,
Sinon celui d’une créature, d’un gobelin, d’un troll, d’un
kobold.
Peut-être je tweakerai les paramètres
Pour twinker mon torse davantage.
J’en questionnerai le besoin puisque je pourrai aussi ne plus
en avoir un.
Je ne pourrai être qu’un tas de poils ou de pierres,
De grains mal moulus qui démouleraient leurs envies.
J’ai envie de me upload dans le cloud
Ainsi je n’aurai plus mal au corps.
Les mains putrides des ordures qui me fétichisent
Ne pourront plus me malaxer la peau
M’attraper la tête
Me remplir la bouche.
Ma sueur ne sera plus acide et collante
Même les clics ne pourront plus me glisser dessus.
J’éviterai leurs touchés grâce au vide qui me contient.
Dans le cloud, je serai éclaté.
Les miettes qui forment mon esprit
Voleront dans l’atmosphère réticulaire.
Je serai diffus dans les échos digitaux.
J’extirperai les données déchirantes d’un temps révolu
Dont les débris m’alourdissent encore.
Je serai mon propre modérateur de contenu,
Et décontenancerai mon système en me délestant.
Dans le cloud, seuls les yeux pourront me toucher
Il n’y aura plus de pupilles désobligeantes
Puisqu’iels ne sauront même pas ou regarder.
L’effervescence fera frétiller leurs yeux
A leur en donner le vertige.
Le tourbillon cyclonique enveloppera leurs a priori
Les effaçant d’un coup de vent.
Dans le cloud, je circulerai de data en data.
Mes résidus visiteront les coins des forums oubliés
Pour qu’aucun espace ne soit sans mémoire.
Dans le cloud je serai partout, une vérité absolue.
Plus personne ne me fera chier.
J’arpenterai les fichiers des adelphes
Afin de reposter leurs voix silencées.
Je piraterai les contenus qui nous assassinent sans cesse
Exterminerai les reddit des incels à coup de Sassy et Netsky;
Vos ongles ne grifferont plus ma chair.
La constance de mon corps en fragments
Recollera les morceaux des douleurs éparpillées.
La poussière ne pourra plus s’immiscer dans mes
interstices
Je deviendrai un amas de corpuscules
Prêt a flotter là où les onglets nagent.
Mes doigts électriques bourdonnent et passent entre les
filaments cybernétiques
Je deviens l’autre, la machine éthérée
Si je me dissous j’aimerais que tu boives le liquide dans
lequel je me suis émietté
Les gouttelettes du cloud perlent entre mes molécules
Je n’aurai plus jamais à voir ma salive d’aussi près.
Je le jure, quand je m’upload dans le cloud
La fièvre de mes blessures passées brûlera les machines des
assaillants
Les quelques virus qui me composeront
Couperont les engins dont ils sont trop fiers.
Les particules qui me couvraient auparavant m’écouteront
désormais .
Je deviendrai l’unité par superposition,
Une entité de la multitude ambiante.